Idées
très sombres, cauchemars atroces, TOCs, émétophobie depuis
l’enfance, puis crises d’angoisse, dépression, automutilation,
"pensées magiques merdiques",
peur excessive de l’abandon, tentatives de suicide… KNL a attendu
l’âge de 25 ans pour être diagnostiquée borderline, et quatre
ans de plus pour qu’ "un (fabuleux) psychiatre"
trouve le traitement adapté ("ma vie est calme et paisible
(alléluia!!").
KNL
partage avec nous, en aquarelle avec "des p’tits points, des
milliers de p’tits points", deux ans de carnets de
bord ("certains ont à leur cursus, HEC, l’ESSEC, l’ENA…
UCLA. Mon parcours personnel tourne plutôt vers les CMP, CHU et
autres HP, chacun sa destinée") : la clinique sur la butte
d’Orgemont, sa tisanière ("un peu comme le bistrot du coin…
mais sans alcool"), son "steak semelle de rando" et
son ascenseur fou ("A tous ceux qui ont pensé tellement fort
"elle n’a qu’à prendre les escaliers"… Eh bien non!
Il n’y en a pas!"), l’extrême dureté de l’hôpital
psychiatrique, les permissions, les rechutes, l’hôpital Saint
Anne, et même deux voyages (dont l’un sera uniquement onirique)
respectivement au Sénégal et sur l’île de la Réunion. Et le
moins qu’on puisse dire, c’est qu’il y a des hauts et des bas,
même si on oublie l’instabilité émotionnelle propre au trouble
borderline : l’autrice compare souvent sa vie à un grand huit.
Le
ton lui-même varie, de la description documentaire de la maladie,
des considérations sur le quotidien, l’environnement, les autres
patient·e·s de la clinique ou de l’hôpital, aux proches de KNL (sa
mère, " maman super-woman", et Romain, son "super
amoureux", "dit Chou ou Chouchou") et aux moments les
plus durs. En effet, si le ton est souvent léger, si l’humour
fonctionne bien (" "-Je vais prendre votre tension, 10/8!
Très bien, votre week-end s’est bien passé? -Oui, oui, très
agréable, et le vôtre? -Bien, je vous remercie… et le transit, ça
va? -Oui, oui très bien, et le vôtre ?" Blanc... ",
"Comme quand on est tout petit à l’école, la maîtresse nous classe dans des groupes selon notre niveau, les wapitis, les castors ou encore le groupe des coccinelles. A l’hôpital, c’est pareil, mais en moins fun, je suis dans le groupe "Surveillance 2" "), certains passages sont bien plus sombres. C’est vite tentant de l’oublier, mais il est question de peur de rechuter, d’environnements parfois presque traumatisants ("Chaque fois que j’essaye d’aborder les illustrations concernant mon séjour en hôpital psychiatrique, je bascule dans des crises d’angoisse ingérables. Voici ma solution, je vais plutôt dessiner des crevettes dans leur milieu naturel (et pourquoi pas ?)"), et de tentatives de suicide ("pour calmer le jeu, je décide de me faire un bain bien chaud, l’idée paraissait bonne… […] Mon sang se mélange à l’eau claire, c’est intrigant, puis de plus en plus impressionnant. Très vite, je me retrouve immergée dans une eau écarlate devenue tiède", " "J’ai trois visions récurrentes maman, je me vois allongée sur un brancard avec une perfusion sur chaque bras et les poignets attachés aux barreaux du lit?" "Oui, c’est parce que tu étais agitée, tu n’arrêtais pas de les arracher" "). Mais ces moments si douloureux sont ceux qui donnent le plus de force au message final : "A vous qui êtes en plein combat, tenez bon ! De tout mon cœur je vous encourage à résister, à batailler, car un jour, vous en sortirez vainqueur et votre vie aura un tout autre sens".
Dans ce voyage bref mais intense (la métaphore du grand huit est appropriée!), l’autrice informe sur la violence du trouble borderline, sur la diversité de ce qui peut être vécu en cas d’hospitalisation, sur la difficulté de trouver un traitement adapté et sur ce que ça entraîne en effets secondaires, sur des années, sur la rapidité à laquelle il est possible de basculer dans une crise d’angoisse ou pire… et trouve la force de terminer son récit sur un message optimiste.
Merci pour cet ouvrage. J'aime les illustrations et l'écriture. Il donne de la légèreté a une maladie pourtant bien lourde.
RépondreSupprimerEn effet, la forme (ton, dessins, ...) permet d'apporter de la légèreté au récit sans occulter la violence (les violences) du vécu
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