Les auteurs précisent à la fin que tout ce qui est proposé n'a pas vocation à être une méthode clefs en main, que le·a thérapeute devra prendre ses propres décisions et qu'ils estiment d'ailleurs qu'iel est là pour ça, la flexibilité, l'adaptation étant garantes d'une bonne thérapie... mais heureusement qu'ils le disent! Un des éléments qui rend le contenu particulièrement dense est que les étapes thérapeutiques sont extrêmement structurées, avec un nombre optimal de séances (huit) qui inclut, dans un ordre donné, des séances avec le couple ensemble et séparément avec chaque membre, des instructions précises sur ce qui est à évaluer et comment l'évaluer, les propositions successives pour aboutir d'une part à une meilleure écoute et d'autre part à des actions concrètes, avec même des indications pour les cas spécifiques (situation d'adultère, violences dans le couple, éviter les discriminations involontaires, ...) ... Certes, rien ne permet de douter de la vitalité du processus thérapeutique (des exemples sont régulièrement donnés, dont des retranscriptions d'extraits de séances, et même des vidéos que je n'ai pas encore pris le temps de regarder), mais le protocole de départ est plutôt strict.
L'évaluation initiale des difficultés du couple se fait selon le modèle DEEP. Le D de départ correspond aux Différences entre partenaires : non, l'âme sœur absolue n'existe pas, et des différences de tempérament, de désirs sexuels, de valeurs (dans l'éducation des enfants, par exemple, ou même le désir d'enfants), ... pourront être source de conflits, potentiellement récurrents. Le premier E désigne la vulnérabilité émotionnelle ("Emotional Sensitivities") : ce qui est blessant pour l'un·e peut être anodin pour l'autre, avec le risque d'un manque d'attention d'un côté, et d'une réaction perçue comme exagérée de l'autre. Avec le second E, on passe de l'interne à... l'Externe, avec les circonstances extérieures qui parfois pèsent lourd sur la relation : maladie (dans le cas d'Hank et Maria, un soupçon de retard de développement pour James), précarité, relations compliquées avec les parents de l'un ou de l'autre, ... Enfin, le P de DEEP est l'identification des modèles ("Patterns") de communication et d'interaction, la façon qu'a chacun de tenter de résoudre les difficultés. Oui, en français ça fait DVEM et ça ne veut absolument rien dire. Ce modèle permet d'aller plus loin ("deeper") dans l'analyse des difficultés, tout en restant conforme au principe de départ selon lequel la relation se détériore avec l'augmentation des moments désagréables et la diminution des moments agréables. Pour mieux comprendre ce qui se passe, pour chacun·e, derrière chaque élément, il est indispensable de prendre le temps de faire des entretiens individuels avec chaque membre du couple, ce qui est proposé par les auteurs après une première séance commune. Ces entretiens permettront aussi de savoir dans quel mesure chaque personne a l'intention de s'investir dans la thérapie et croit que le couple peut effectivement aller mieux, et de présenter un questionnaire hebdomadaire (degré de satisfaction dans le couple, interactions positives et déplaisantes de la semaine, ...) qui servira d'appui aux séances suivantes.
En plus de l'élaboration de changement concrets et précis qui conviendront à chaque membre du couple (tout en gardant des attentes réalistes : par exemple, quelqu'un qui rentre souvent tard peut s'engager à rentrer moins tard en général, à l'heure prévue une ou deux fois par semaine, et prévenir quand il est en retard, plutôt que d'annoncer que du jour au lendemain il va soudain être à l'heure tous les jours) avec, j'en ai parlé plus haut, une méthodologie détaillée, un fort accent sera mis sur la communication et, TCC 3ème vague obligent, en particulier sur l'aspect émotionnel de la communication. Les axes principaux seront l'acceptation des sentiments de l'autre (accepter ne signifiant pas nécessairement être d'accord), donc de prendre le temps de les écouter dans un premier temps sans jugement, avant de répondre en explicitant ses propres sentiments. La diminution de l'intensité des émotions négatives sera aussi un élément important ("Dans presque tous les conflits conjugaux quelle qu'en soit la durée, il y a à la fois un problème bien réel et une certaine tendance a surréagir, ou une sensibilité acquise, suite aux nombreux échecs à régler ce problème") : c'est plus facile d'écouter l'autre, de prendre soin de l'émotion derrière la demande, quand on est pas soi-même dans un état de détresse (colère, découragement, ...) envahissant. Un exercice particulièrement contre-intuitif sera par exemple proposé : déclencher le conflit avant d'être vraiment en colère, et observer ce que ça change dans les échanges qui vont suivre.
Le livre se marque vraiment par son aspect détaillé, inutile de préciser que je n'ai fait qu'en évoquer rapidement les grandes lignes. Il n'est malheureusement pas disponible (pour l'instant?) en français... mais un site propose documents et formations , ce qui m'a permis de voir que le livre des mêmes auteurs destinés aux couples (Reconciliable Differences, résumé a venir sur ce blog mais pas tout de suite du tout) a, lui, été traduit, si lesdites grandes lignes vous ont donné envie d'en savoir plus.
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