Dans ce livre considéré (du moins par l'éditeur
français) comme le livre fondateur de la PNL (programmation
neuro-linguistique), les auteurs vont s'attarder sur la partie
linguistique de ceux et celles qui voudraient s'adonner à la magie ("la
magie, tout comme les autres activités humaines complexes, a une
structure") de cette méthode thérapeutique. Les auteurs
mettent en lumière trois éléments dans le langage (la
Généralisation, l'Effacement et la Distorsion) qui limitent les
représentations de l'individu, et proposent un modèle d'entretien,
le Méta-modèle (qui, les auteurs insistent là-dessus, est
parfaitement compatible avec d'autres méthodes de psychothérapie),
à même de lever ces obstacles, qui peuvent être source de
souffrance ("quand les gens viennent nous voir en consultation en
exprimant de la douleur et de l'insatisfaction, les limites qu'ils
ressentent se trouvent le plus souvent dans leur représentation
du monde, et non dans le monde en soi"). Le·a lecteur·ice/apprenti·e
sorcier·ère est donc invité·e à assimiler, à travers des exercices pour
que ça devienne des automatismes, les différents types
d'intervention qui amèneront le·a client·e à modifier ses
représentations douloureuses (en termes techniques, partir de sa
Structure de Surface pour accéder à sa Structure Profonde).
La Généralisation consiste à considérer une
règle comme absolue. Elle peut être remise en question dans un
premier temps en amenant le·a client·e à réaliser qu'iel généralise,
puis en lui proposant de trouver un contre-exemple ("Quand je veux
négocier quelque chose, il faut toujours que ça finisse mal"
"Toujours?" "En tout cas, en général, c'est comme ça que ça se
passe" "Est-ce que vous pouvez donner un exemple d'une fois où
vous avez négocié quelque chose, et où ça s'est bien passé?").
L'Effacement, vital au quotidien si on ne veut pas que dire bonjour à
son prochain dure 3 heures à chaque fois, offre de nombreuses pistes
au thérapeute pour mieux explorer les représentations du ou de la client·e :
c'est le fait de laisser des éléments non identifiés dans la
phrase. Dans l'exemple précédent, si le·a thérapeute avait préféré
travailler sur l'Effacement plutôt que sur la Généralisation, iel
aurait pu demander ce que le·a client·e voulait dire par "mal finir",
ce qu'iel voulait négocier, avec qui, … La Distorsion est une
représentation déformée de la réalité qui va avoir
l'inconvénient de limiter les possibilités d'action du ou de la client·e :
la lecture de pensée ("mon voisin me déteste", "cette inconnue
est follement amoureuse de moi et m'envoie sans cesse des signaux", …), le fait de prêter certains pouvoirs à des
éléments extérieurs ("le métro me fait tout le temps arriver en
retard", "je vais passer un après-midi catastrophique à cause de
ce temps pourri", "mon entraîneur me ruine la santé à me
fixer des objectifs qui m'empêchent de dormir") sont des formes de
Distorsion. Ces représentations peuvent être relativisées en
interrogeant le·a client·e sur leur source ("que fait le métro pour
vous empêcher d'arriver à l'heure? Qu'est-ce que vous pourriez
faire pour remédier à la situation ?" "Votre
voisin vous déteste? Vous êtes sûr que vous arrivez à lire dans
ses pensées? Alors qu'est-ce qu'il fait pour vous donner
l'impression qu'il vous déteste?").
Pour éclairer tout ça, les auteurs nous
fournissent la retranscription commentée de deux entretiens
cliniques enregistrés. Dans le premier, Ralph est bien ennuyé car
il ne se sent pas capable de donner aux autres une bonne image de
lui. Dans le second, Beth en a doucement ras-le-bol que ses colocataires ne
l'aident jamais : leur demander de l'aide directement, ça ne se
fait pas trop, mais iels pourraient quand même de temps en temps
prendre des initiatives. A la fin des entretiens, on sait que c'est
surtout à sa collègue Janet que Ralph veut faire bonne
impression (et que rien ne l'empêche, même si c'est moins
confortable, d'aller lui dévoiler ses sentiments plutôt que
d'attendre qu'elle lui tombe dans les bras), et Beth admet que ses
colocataires, de bonne volonté ou non, ne peuvent pas deviner de
quoi elle a besoin et quand, et réalise que demander des choses aux
gens n'est peut-être pas si incorrect que ce qu'elle imaginait. En
plus d'éclairer le fonctionnement de la liste de techniques
présentées dans le chapitre précédent (le commentaire a en plus
l'avantage de montrer que le·a thérapeute a souvent le choix entre
plusieurs relances), les entretiens illustrent leur intérêt :
une demande qui semble reposer sur des objectifs pratiques, terre à
terre, dévoilent rapidement une souffrance personnelle, intime, qui
sollicitera de fortes émotions. Ralph a du mal à concevoir qu'on
s'intéresse à lui parce que, jeune, il a beaucoup souffert du
manque de marques d'affection de sa mère (le thérapeute s'attachera
à l'aider à différencier manque de marques d'affection et manque
d'affection). Beth a, quel que soit le contexte, peur d'être
blessante si elle demande quelque chose.
Même si les termes de linguistique au début du
livre peuvent faire peur, la méthode et ses enjeux sont simples à
comprendre. Si l'entretien est beaucoup plus directif que dans
l'Approche Centrée sur la Personne, les objectifs sont en grande
partie similaires (prise de distance avec les représentations,
autonomie, accès aux émotions, aller du général au personnel, …). Certains éléments rappellent
aussi la Gestalt thérapie (amener à préférer la première
personne dans les affirmations) ou les TCC (remise en question des
différentes interprétations d'une situation, d'un comportement, …),
et les auteurs sont les premiers à rappeler que le Méta-modèle est
un outil utilisable dans diverses thérapie. La méthode permet
l'exercice d'équilibriste de guider le·a client·a sans lui faire
partager les représentations du ou de la thérapeute (encore que c'est
parfois limite dans le deuxième entretien donné en illustration :
la vigilance sur le langage non verbal doit être de mise), et est
probablement efficace aussi pour pratiquer l'introspection.
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