jeudi 9 janvier 2020

Le bébé et sa famille, dirigé par Denis Mellier




 Par sa simple venue au monde, le bébé est créateur de nombreux enjeux : il recompose l’arbre généalogique (ses parents deviennent parents, ses grands-parents deviennent grands-parents, …), le couple amoureux devient aussi couple parental, des attentes inconscientes sont posées sur lui en tant que dépositaire d’une continuité familiale, d’une culture, … Dans ce livre plutôt récent (2015), les auteur·ice·s proposent des pistes d’exploration de ces différents aspects dans la clinique, avec le cadre théorique de la psychanalyse.

 Reconstruction de la relation de couple, échos inconscients des interactions avec le bébé, le champ des applications concrètes est vaste. Le livre lui-même couvre des aspects très divers, allant des observations cliniques (parfois dans le cadre de la recherche, parfois dans le cabinet du ou de la thérapeute) aux développements théoriques plus novateurs (Didier Houzel explique comment il interprète la phrase de Frances Tustin "Au fond l’Oedipe c’est le partage", qui l’avait laissé perplexe quand il l’a entendue, ...) en passant par l’exploration plus en longueur d’aspects spécifiques, tels que les représentations autour du fœtus, qui ont nécessairement évolué avec les progrès technologiques et médicaux (le chapitre, de Sylvain Missonnier, est adroitement intitulé "Sa majesté le fœtus") ou, dans le chapitre (de Drina Candilis-Huismman) dont j’ai regretté la brièveté, les parents handicapés (qui doivent souvent, en plus de gérer leur propre rapport à la parentalité et les difficultés éventuelles d’accessibilité, composer avec les insécurités et représentations des personnels soignants!).

 Les nombreux enjeux évoqués pourront bien sûr intéresser tout·e clinicien·ne, qui a de fortes chances d’avoir affaire à un moment ou un autre de sa carrière à des parents voire, sait-on jamais, à des personnes qui se trouvent avoir des parents, mais aussi à tout·e professionnel·le travaillant dans le milieu de la périnatalité. Certains passages sont vraiment techniques et nécessitent des connaissances avancées (que je n’avais absolument pas) sur Freud, Winnicott, Klein, Bion, pour tout saisir, mais une grande partie du livre reste accessible avec des notions très basiques en psychanalyse. J’ai regretté une conception assez monochrome de la parentalité, qui sur l’ensemble de la lecture semble concerner pour l’essentiel des couples hétérosexuels, encore ensemble, parents de l’ensemble de la fratrie, ce qui ne me semble pas correspondre tant que ça au monde réel. C’est peut-être un choix des auteur·ice·s de se limiter aux spécificités de cette situation, qui recouvre déjà une certaine complexité, mais il n’est pas particulièrement mentionné que, si elle correspond à la représentation spontanée et normative du concept de parents, c’est une situation spécifique parmi d’autres.

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