Mademoiselle Caroline ("née avec 25 kilos de trop") et Mathou ("des kilos en trop depuis bien trop longtemps") racontent à quel point les stéréotypes sur le surpoids leur pourrissent la vie au quotidien.
Les injonctions sociales, le rappel de leur statut, est partout, dans les appels à faire un régime qui surgissent dans tous les sens (couvertures de magazines, livres, médiatisation de nouvelle méthode miracle, remarques des soignant·e·s et des proches, ...), les plaisanteries dans la fiction ou dans la vie quotidienne, les recommandations médicales parfois douteuses sur le fond et/ou sur la forme ("Je suis surpris, vous n'avez pas de cholestérol. J'aurais cru pourtant", "-Oui mais pour mon allergie? -Maigrissez, vous verrez, vous irez mieux", "vous avez une grosse hernie discale. Vous êtes enceinte de jumeaux. Vous allez donc prendre une quarantaine de kilos, telle que je vous connais. Vous allez avoir la moelle épinière écrasée, finir tétraplégique. Faudrait songer à l'avortement"). Les remarques déplacées sont fréquentes, et les personnes qui les font ne veulent pas entendre que c'est blessant ("tu te victimises", "c'est parce qu'on tient à toi qu'on te dit ça, tu sais", "si tu te plais pas, t'as qu'à maigrir au lieu de nous faire chier avec ton poids", ...).
Les autrices montrent à quel point cette ambiance les envahit, les pousse à réfléchir à leur moindre faits et gestes, culpabiliser ou s'inquiéter du moindre relâchement, se préoccuper sans arrêt de leur apparence ("je regarde si j'ai des mégabourrelets quand je m'assois... les gens vont les voir... je calcule comment m'asseoir pour que ça se remarque moins") et ce, qu'elles soient ou non effectivement au régime et, surtout, quoi qu'elles pensent de la légitimité de ces jugements et injonctions : "On a intégré leur grossophobie. Notre poids est devenu l'échelle de notre propre valeur. Tout ce qu'il ne faut pas faire, pas penser, pas intégrer, on le fait."
Le combat est collectif et de long terme, et est magnifiquement rappelé dans la conclusion : "Quand on aura vraiment compris que le poids n'est pas une échelle de valeur, la grossophobie rend les gens plus gros, et plus tristes, personne ne décide si je suis belle, sexy ou désirable. Quand tout ça ne sera pas qu'un discours militant qu'on admire ou des phrases bateau de pseudo-développement personnel... que ce sera devenu des mots compris, intégrés, digérés auxquels on adhérera totalement, sans se dire "oui mais bon, si je perdais un peu, je serais une meilleure personne", ce jour là, on aura tout gagné".
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