Guerre, torture, exil, colonisation, les violences qui ont une dimension collective sont nombreuses, multidimensionnelles, peuvent être dévastatrices pour les victimes comme pour les bourreaux dont le statut, dans ces situations, est loin de toujours être le résultat d'un libre-arbitre. L'autrice a environ 15 ans d'expérience clinique auprès de personnes concernées, dans différents pays.
Pour autant, le livre est... très frustrant. Le constat est difficilement contestable : oui, les stéréotypes se mettent en travers du soin et plus largement de l'accueil de ces personnes qui ont un vécu spécifique (déracinement, deuils multiples, culpabilité, désir de vengeance, ...), difficilement compréhensible de façon profonde et satisfaisante pour ceux et celles qui ne sont pas concerné·e·s, oui, un dogmatisme dans l'approche de la thérapie peut amener le ou la thérapeute à confondre une ignorance crasse et une fermeture d'esprit avec de l'expertise et de la sagesse et faire bien plus de mal que de bien aux personnes accompagnées (l'autrice utilise pour en parler le concept de maltraitance théorique, et donne l'exemple des personnes transgenre, n'hésitant pas à nommer par exemple Colette Chiland en citant des propos abominables qu'elle a tenus sur ce sujet), oui, la pluridisciplinarité est une clef pour avancer de façon sérieuse et constructive et ne pas s'enfermer dans des concepts rigides.
Sauf que... toute cette expérience, toutes ces valeurs que je suis le premier à partager, sont restitués sous la forme d'un langage ampoulé qui donne artificiellement une impression de complexité alors qu'il y a à peu près trois ou quatre idées qui sont répétées encore et encore dans les 250 pages de l'ouvrage ("psychologie géopolitique clinique", ça fait beaucoup de mots -et l'autrice aime beaucoup rajouter des mots et les mettre en italique et les détailler pour montrer à quel point ce qu'elle propose c'est très sérieux et c'est très la complexité- pour dire que pour accompagner une personne il faut prendre son vécu dans son ensemble -historique, autobiographique, culturel, religieux, ...- et pas juste un aspect a fortiori si c'est une grille de lecture plaquée d'autorité sur le symptôme, ce qui est certes important mais qu'on peut exprimer de façon bien plus directe et accessoirement plus courte et moins hautaine). La prétention va jusqu'à basher du revers de la main les autres approches (qu'est-ce que ce serait s'il n'y avait pas la pluridisciplinarité et la nécessité de se prémunir d'une rigidité théorique dans les valeurs portées!) qui sont évidemment toutes superficielles et pour la plupart motivées par la cupidité parce que pourquoi pas (mais on ne va pas non plus l'argumenter sérieusement ou le sourcer, ce ne serait pas assez hautain).
S'il y a quelques éléments intéressants, ce livre reste à mon sens une lecture très dispensable alors que vu le sujet et l'expérience clinique de l'autrice il ne devrait vraiment, vraiment pas l'être. Je l'ai refermé avec une énorme sensation de gâchis.
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