Psychothérapeute (et même psychologue-psychothérapeute, d'après son site web) mais aussi, ça aura de l'importance, mère de famille, l'autrice propose des moyens d'élever son enfant en respectant ses émotions plutôt qu'en les réprimant, cette seconde option étant pourtant parfois conseillée plus ou moins explicitement par des ami·e·s, de la famille, des passant·e·s, des professionnel·le·s qui trouvent vital d'établir une autorité ferme, le moindre signe d'obéissance à l'enfant risquant d'en faire un enfant-roi, un·e délinquant·e, ... Isabelle Filliozat, voyant plus les enfants comme des fleurs que comme des bonzaïs, démontre pas à pas que l'écoute des enfants et la prise en compte de leurs désirs est souhaitable pour tou·te·s, et ne mène pas aux catastrophes annoncées à travers des conseils "bienveillants" (ou un hochement de tête d'un air entendu et des propos nostalgiques d'un -il paraît- âge d'or quand l'enfant a l'excellente idée, pour le plus grand bonheur de ses parents, de faire une crise spectaculaire dans un lieu public).
L'autrice insiste pour qu'on accepte le fait que les émotions des enfants ont un sens, qu'elles sont saines, même si des fois on est fatigué et on a pas envie ("nous aimerions que nos enfants ne soient pas des enfants!"). Il importe donc de laisser s'exprimer la colère, les larmes, même lorsqu'elles sont en réaction à une demande ou une interdiction justifiée, ou que l'argument facile que ce sont les petit·e·s qui pleurent nous tend la main. Une émotion exprimée n'est par ailleurs pas nécessairement une demande, par exemple si un enfant n'a pas l'autorisation de rester debout après l'heure du coucher, l'autoriser à dire qu'il n'est pas d'accord ne remet pas pour autant la règle en question, on peut même lui dire qu'on comprend qu'il·elle ne soit pas d'accord (une anecdote est rapportée où, alors que la fille de l'autrice dit qu'elle a envie d'un gadget, elle lui répond qu'elle ne peut pas l'acheter - réponse réprobatrice: "Je sais que tu ne vas pas me l'acheter, mais j'ai quand même le droit d'en avoir envie!"). S'il est possible d'enseigner à ses enfants à ne pas exprimer leurs émotions, en particulier négatives, les émotions elles-mêmes ne disparaissent pas pour autant par un étrange tour de magie, et cette réprobation a un coût qu'il·elle·s payeront, ou feront payer à leur futur conjoint·e, leurs futurs enfants, ... Le sens de telle ou telle effusion est par ailleurs parfois plus facilement accessible à l'adulte attentif, qui prend le temps de questionner et d'écouter les réponses, qu'à l'enfant lui-même. Quand une réaction est disproportionnée, l'événement qui en est à l'origine n'est est probablement que le déclencheur, et une angoisse, une rancœur, une tristesse plus profondes ne peuvent que gagner à être identifiées à cette occasion. Il est donc conseillé de ne pas céder à la tentation de minimiser l'incident, mais de demander à l'enfant, une fois calmé (si vous avez déjà essayé vous savez qu'avant c'est pas la peine), ce qu'il a ressenti, comment l'incident a été vécu, ... en évitant la question "pourquoi", bien pratique mais trop vague et parfois porteuse de jugement car rhétorique.
Les recommandations faites pour les enfants pourraient en fait en grande partie s'appliquer aux adultes... ce qui est précisément l'occasion de faire comprendre à l'adulte en question que, dans la mesure où il a les clefs pour tourner les émotions négatives des enfants à leur avantage, il doit s'en donner les moyens rationnels (ça en théorie c'est fait quand on a lu le livre, ou alors le but de l'autrice m'a un peu échappé) mais aussi émotionnels. Quand vient le moment de poser un interdit, quand l'exaspération monte, il peut être intéressant de respirer à fond et de se demander la raison de la règle énoncée, de l'impatience. Une règle dont les tenants et les aboutissants sont maîtrisés par celui ou celle qui l'impose (non, "parce que c'est comme ça", ce n'est pas maîtriser les tenants et les aboutissants) peut être comprise et négociée, donc mieux acceptée, par l'enfant (l'autrice a par exemple accepté de laisser manger une glace en entrée par sa fille après s'être renseignée et avoir constaté que ça n'avait pas nécessairement moins de sens que de la manger en dessert... l'intéressée, après un certain temps d'expériences de repas dans le désordre, a fini prendre l'habitude de manger ses desserts en fin de repas par conformisme, et n'en a à aucun moment déduit qu'elle avait le contrôle de ce qui se passait à table... à un autre moment, l'autrice, agacée que ses enfants ramassent des marrons plutôt que de monter dans la voiture pour rentrer, a réfléchi une seconde et réalisé que son projet de la journée était de passer un bon moment avec eux, que ramasser des marrons était donc plutôt une bonne initiative, et les a rejoints). Mais la raison peut également être plus profonde, le mal-être a un prix qu'on peut tendre à faire payer, volontairement ou non, aux autres. Il faut donc savoir reconnaître ses propres besoins, les écouter, et éventuellement les dire et les revendiquer... le bien-être, c'est aussi savoir apprécier les moments de bonheur, et s'en souvenir pour relativiser quand l'exaspération se fait sentir un peu trop vite. Plus délicats sont les conflits d'enfance avec les parents non résolus, les rancœurs gardées pour soi. Le premier pas pour s'en libérer est de les identifier et de les accepter, même s'il peut être difficile d'accepter d'en vouloir à ses parents, en particulier quand on a passé une grande part de sa vie à le refuser.
Si l'ensemble de l'argumentation se tient, sans être révolutionnaire (en même temps on peut vouloir être guidé dans l'art impossible d'être un parent parfait sans vouloir apprendre par cœur Freud, Dolto, Bowlby, Salomé ou le Traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens) mais abondamment illustrée de situations concrètes, certaines affirmations peuvent parfois faire sauter au plafond! Je ne me suis personnellement pas remis de l'odieux et absurde "tout se joue avant 6 ans" (à se demander l'intérêt d'écrire le livre, puisqu'il y a de fortes chances que le·a lecteur·ice moyen·ce ait dépassé cet âge), situé en intro pour donner envie de lire le reste, ni, pire encore, de quand l'autrice évoque (au moment où elle confond joyeusement pensée prélogique et inconscient) un enfant qui aurait développé une leucémie pour remettre ses parents ensemble (j'espère, j'espère, s'il s'agit d'une situation réelle, qu'elle n'a pas sorti sa connerie aux parents... elle n'y va d'ailleurs pas de main morte sur le psychosomatique, l'épouse insatisfaite qui ne prend pas l'initiative de divorcer risque de "faire (sic) un cancer", et elle affirme plus tard "Vous n'êtes pas heureux dans votre vie? Cancer, infarctus ou dépression ne vont pas soulager vos enfants"... vous allez être gravement malade ET être responsable des souffrances de vos enfants, vous voilà prévenu·e!). On peut également sourire quand elle dévoile en deux phrases le secret pour gagner les JO, rien que ça (l'éthique me force à partager un savoir si précieux - "qu'est-ce qui fait la différence entre celui qui deviendra un champion olympique et un autre? La fierté, la joie ressentie du succès"- les personnes intéressées n'ont plus qu'à préparer Rio 2016). Je me demande également s'il est si sain que ça de laisser exploser à fond sa colère devant ses enfants (ou d'aller ostensiblement -discrètement, c'est un peu compliqué- le faire dans une autre pièce), même en s'assurant après qu'ils aient bien compris qu'ils n'étaient pas responsables de cette colère, ou de dire à un enfant "j'ai envie de te frapper", même si c'est vrai et qu'on explique après que, pour de très bonnes raisons, on évite de le faire (le tout après avoir évoqué, constat d'origine inconnue, "les difficultés assez généralisées des adultes d'aujourd'hui à gérer leur colère de manière efficace et non-violente"... il y a de quoi être rassuré qu'elle ne donne pas de solution pour gérer la cupidité ou l'excès de libido). Elle développe également un point de vue (défavorable) sur les contes de féesqui devrait être passible d'une peine de mort lente et douloureuse que je désapprouve (on ne touche pas aux contes de fées, non mais!).
C'est donc quelque peu frustrant de voir ce plaidoyer contre une tendance à voir l'éducation comme l'apprentissage de la soumission (pour le bien des enfants, cela va de soi), alors qu'apprendre la liberté c'est précisément apprendre à être responsable, fourni avec manuel pédagogique d'application (bilans des chapitres sous formes de listes, situations concrètes très, très nombreuses), parsemé d'étrangetés plus ou moins absurdes et plus ou moins graves. A moins qu'il ne s'agisse d'une invitation à appliquer ce conseil donné en début d'ouvrage : "faites-vous confiance", "quand on fait quelque chose par obéissance aux idées d'un autre, on peut se tromper". Oui, on va dire que c'est ça...
Si l'ensemble de l'argumentation se tient, sans être révolutionnaire (en même temps on peut vouloir être guidé dans l'art impossible d'être un parent parfait sans vouloir apprendre par cœur Freud, Dolto, Bowlby, Salomé ou le Traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens) mais abondamment illustrée de situations concrètes, certaines affirmations peuvent parfois faire sauter au plafond! Je ne me suis personnellement pas remis de l'odieux et absurde "tout se joue avant 6 ans" (à se demander l'intérêt d'écrire le livre, puisqu'il y a de fortes chances que le·a lecteur·ice moyen·ce ait dépassé cet âge), situé en intro pour donner envie de lire le reste, ni, pire encore, de quand l'autrice évoque (au moment où elle confond joyeusement pensée prélogique et inconscient) un enfant qui aurait développé une leucémie pour remettre ses parents ensemble (j'espère, j'espère, s'il s'agit d'une situation réelle, qu'elle n'a pas sorti sa connerie aux parents... elle n'y va d'ailleurs pas de main morte sur le psychosomatique, l'épouse insatisfaite qui ne prend pas l'initiative de divorcer risque de "faire (sic) un cancer", et elle affirme plus tard "Vous n'êtes pas heureux dans votre vie? Cancer, infarctus ou dépression ne vont pas soulager vos enfants"... vous allez être gravement malade ET être responsable des souffrances de vos enfants, vous voilà prévenu·e!). On peut également sourire quand elle dévoile en deux phrases le secret pour gagner les JO, rien que ça (l'éthique me force à partager un savoir si précieux - "qu'est-ce qui fait la différence entre celui qui deviendra un champion olympique et un autre? La fierté, la joie ressentie du succès"- les personnes intéressées n'ont plus qu'à préparer Rio 2016). Je me demande également s'il est si sain que ça de laisser exploser à fond sa colère devant ses enfants (ou d'aller ostensiblement -discrètement, c'est un peu compliqué- le faire dans une autre pièce), même en s'assurant après qu'ils aient bien compris qu'ils n'étaient pas responsables de cette colère, ou de dire à un enfant "j'ai envie de te frapper", même si c'est vrai et qu'on explique après que, pour de très bonnes raisons, on évite de le faire (le tout après avoir évoqué, constat d'origine inconnue, "les difficultés assez généralisées des adultes d'aujourd'hui à gérer leur colère de manière efficace et non-violente"... il y a de quoi être rassuré qu'elle ne donne pas de solution pour gérer la cupidité ou l'excès de libido). Elle développe également un point de vue (défavorable) sur les contes de fées
C'est donc quelque peu frustrant de voir ce plaidoyer contre une tendance à voir l'éducation comme l'apprentissage de la soumission (pour le bien des enfants, cela va de soi), alors qu'apprendre la liberté c'est précisément apprendre à être responsable, fourni avec manuel pédagogique d'application (bilans des chapitres sous formes de listes, situations concrètes très, très nombreuses), parsemé d'étrangetés plus ou moins absurdes et plus ou moins graves. A moins qu'il ne s'agisse d'une invitation à appliquer ce conseil donné en début d'ouvrage : "faites-vous confiance", "quand on fait quelque chose par obéissance aux idées d'un autre, on peut se tromper". Oui, on va dire que c'est ça...
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