L'entretien, clinique ou non, étant une suite
d'actes de langage, il fallait bien s'attendre à ce que la
linguistique, cette discipline scientifique qu'on a laissée entrer
dans les cursus littéraires (alors que, à l'évidence, elle porte
des baskets), s'y intéresse.
Dans ce livre extrêmement technique, l'auteur
décompose les différents types de prises de parole de
l'interviewer·euse, et leurs effets. S'il est écrit par un clinicien, le
livre concerne d'ailleurs tout autant les entretiens de recherche, en
clinique ou autre. La lecture du premier chapitre demandera de
beaucoup s'attarder sur le vocabulaire spécifique (les étudiant·e·s de
l'IED reconnaîtront une partie du programme de psychologie cognitive
de 3ème année) et d'ingérer une quantité certaine d'aspirine,
mais une approche plus pratique sera proposée, non pas dans le
dernier chapitre qui s'intitule "Conclusions pratiques"
(ce serait trop facile!), mais dans l'avant-dernier ("Confrontations
empiriques") qui présente des résultats de recherche.
L'auteur a par exemple constaté que les réitérations d'un énoncé
étaient perçues comme une remise en question (l'interviewé·e va donc
souvent nuancer la partie réitérée par l'interviewer·euse, la présenter
comme subjective, sauf dans le cas plus rare où au contraire iel
devient plus affirmatif·ve), ou encore que relancer par des questions
spécifiques, plutôt que de faire parler plus l'interviewé·e, va
entraîner des réponses brèves et l'attente de la prochaine
question, et qu'il sera difficile de recréer la dynamique de
l'entretien. L'ensemble du livre montre assez clairement que
l'entretien non-directif n'est pas si non-directif que ça, qu'une
certaine façon de poser les questions amène un certain type de
réponses (et encore, il n'est question que du langage purement
verbal!).
Le livre est loin d'être sans intérêt, mais
demandera de s'attarder dessus beaucoup plus que ce que sa petite
taille laisse supposer, et surtout implique d'aimer décortiquer les
aspects les plus techniques de la relation d'entretien. Il devrait
particulièrement intéresser les chercheur·se·s (donc à partir du
Master ou Master 2), même si un·e clinicien·ne y apprendra probablement
aussi des choses utiles.
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