Ce n'est ni ce qui vient à l'esprit en premier quand on pense au métier de psy ("tu vas m'analyser!"), ni le plus sexy, mais une part non négligeable de la valeur ajoutée d'un diplôme de psychologue est la compétence à faire passer des tests. Ça sert en psychologie clinique (le fameux Rorschach par exemple), en neurologie bien sûr, pour faire de la recherche quel que soit le domaine, en psychologie du travail (une sélection à l'embauche, c'est un test : on vérifie par les moyens les plus fiables possibles -ou qui vont le plus faire bonne impression à l'employeur·se, comme la couleur de la peau du·de la candidat·e ou l'analyse graphologique- si un·e candidat·e va être un·e bon·ne employé·e), en psychologie de l'enfant (pour dépister un trouble du développement, ou faire passer un test de QI à la demande de parents qui estiment urgent de
Dans un développement écrit, il paraît qu'on est censé aller du plus évident au plus important, mais là ma
critique concerne les deux : le terme d' "introduction" dans
le titre est plutôt injustifié. C'est bien parce que certains
points sont très approfondis, mais c'est aussi pas très bien parce
que, pour en profiter pleinement, il faut déjà avoir un certain
niveau de compétences sur le sujet. Il est d'ailleurs précisé sur
le 4ème de couverture que l'ouvrage "intéressera tout
particulièrement" les élèves des 1er et 2ème cycles... et
leurs enseignant·e·s! L'étudiant·e en première année qui veut prendre
de l'avance risque d'être vite perdu·e, et même pour les autres, à
moins d'une maîtrise très avancée des stats, certains passages
sont pour le moins acrobatiques à comprendre. Le premier chapitre
(construction d'un test), toutefois, est à la fois simple, clair et
intéressant et est à mon avis à conseiller à tou·te·s les
enseignant·e·s, en tout cas celles et ceux qui seront amené·e·s à infliger des
contrôles de connaissances à leurs élèves, c'est à dire leur
écrasante majorité. Les différences de fonction des QCM, questions
fermées et questions ouvertes sont détaillées, les dangers de
fausser l'évaluation (réponse qu'on peut déduire de la question
-ou des autres réponses proposées dans un QCM-, manque de clarté
de la consigne, niveau d'exigence de la réponse non explicite,
question qui facilite ou complique la tâche pour des raisons collatérales, …), qui rappelleront probablement des souvenirs
d'élève aux lecteur·ice·s, sont listés, ... L'enseignant·e d'histoire-géo
qui a l'habitude de rédiger ses contrôles de connaissance en
mandarin apprendra par exemple avec émotion que, si ses élèves ne
parlent pas le mandarin, leurs mauvais résultats ne s'expliquent pas
nécessairement par un niveau insuffisant en histoire-géo. Si cet
enseignant·e a lui·elle-même un niveau de mandarin catastrophique, ce sera
l'occasion de réaliser que la compétence qu'iel évalue chez ses
élèves n'est ni le mandarin, ni l'histoire-géo, mais la
divination. Il est intéressant aussi de lire qu'un contrôle de
connaissances (l'élève a-t-il appris ce que l'enseignant était là
pour lui apprendre?) ne doit pas être élaboré de la même façon
qu'un test qui doit aboutir à une sélection (par exemple pour
accorder ou non un souhait d'orientation, comme dans Battle Royale mais en moins drôle), tant le système scolaire (en tout
cas français) est une sorte de compromis entre les deux.
Même s'il y a des passages très complexes et envahis d'équations
au sens mystérieux, ça vaut le coup de s'accrocher et, parfois
(souvent), d'accepter de ne rien comprendre du tout
pas saisir toutes les nuances de ce qui est expliqué, parce que si
le livre n'est certes pas organisé par niveau de difficulté,
certaines notions sont importantes et claires. Des problématiques
sur la validité des tests (est-ce que le test mesure ce qu'il est
supposé mesurer?), sur leur fidélité (quel est le poids des
circonstances -juge, contexte de passation, …-?) ou autres notions
essentielles sont parfaitement accessibles, il faut juste les
chercher patiemment au milieu des équations, des tableaux et des
graphiques. On pourra par exemple avoir le plaisir d'apprendre qu'une
distribution de scores peut être platykurtique ou leptokurtique (en
fait ça veut juste dire soit qu'à peu près tous les scores sont
représentés après le passage du test, soit que tout le monde ou
presque a eu un score proche de la moyenne), ou que pour évaluer un
nouveau test, on cherche à vérifier ce qu'il mesure mais aussi ce
qu'il ne mesure pas (par exemple, lorsque que le Rod
and frame test -mais
si, le fameux Rod and
frame test, celui que
tout le monde connaît!- a été converti en test papier-crayon -Test
collectif des figures cachées-,
il a été constaté qu'il y avait corrélation entre les résultats
aux deux tests, donc qu'ils mesuraient comme prévu quelque chose de
comparable, mais que les résultats à la version papier-crayon
avaient moins rien à voir avec certains tests d'intelligence
non-verbale que la version originale, la nouvelle version s'est donc
avérée moins spécialisée).
Malgré mon grand amour pour la mauvaise foi, je ne peux pas accuser les auteurs de mal expliquer. Le livre est difficile d'accès parce que l'univers des tests est loin d'être simple et nécessite beaucoup de connaissances en soi, pas parce qu'il est rédigé dans un langage fantaisiste accessible uniquement à ceux qui l'ont rédigé (non, je ne fais pas référence à un enseignant de l'IED, d'ailleurs je ne vois pas ce qui vous fait dire ça!). Et être pris au sérieux, en tant que lecteur·ice, est plutôt une bonne chose ("Votre adversaire, vous le respectez alors vous le frappez!", disait le respectueux karatéka Fabrice Fourment à ce sujet lors des entraînements), même si ça a quelques inconvénients (comme l'absorption massive d'aspirine ou la sensation d'être idiot·e). Le
terme d'"introduction" reste quand même mal choisi...
Un reproche objectif toutefois :
si le livre comporte en annexe une traduction des hiéroglyphes
symboles mathématiques utilisés, et aussi des termes techniques du
français vers l'anglais et inversement, ce qui peut justifier en soi
de le garder à portée de main, l'absence d'un lexique avec une
définition des termes importants se fait cruellement sentir. Le·a
lecteur·ice qui veut éclaircir une notion en particulier sera réduit·e à
une navigation plus ou moins périlleuse, en devant se contenter de
l'aide relative de la table des matières.
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