vendredi 3 février 2017

Les écrits techniques de Freud (Séminaire, Livre 1), de Jacques Lacan



 Adoré (voire vénéré) ou détesté, connu pour ses concepts aux noms... euh... originaux comme mal-à-dit, sinthome ou objet a ou encore pour sa pratique de la séance courte de la scansion, autant dire que c'est avec appréhension que j'ai ouvert ce premier livre de Lacan, mais aussi avec la curiosité de savoir ce qu'il pouvait bien raconter exactement.

 Dans cette série de séminaires, à travers à la fois ses propres apports théoriques et des analyses minutieuses et critiques de textes de Freud (y compris des éventuelles erreurs de traduction), mais aussi par exemple de Mélanie Klein ou d'Alice et Michael Balint (il est aussi question d'un texte de Saint Augustin, mais j'ai cru comprendre qu'il ne s'agissait pas à proprement parler d'un texte de psychanalyse), il sera avant tout question de représentation. Entre la communication entre analysé·e et analyste, le transfert ("de n'être pas reconnu, le transfert a opéré comme obstacle au traitement. Reconnu, il devient le meilleur appui du traitement"), le rêve ("chaque élément signifiant du rêve, chaque image, fait référence à toute une série de choses à signifier, et inversement, chaque chose à signifier est représentée dans plusieurs signifiants"), les manifestations de l'inconscient, nombreux sont en effet les concepts à préciser ("on distingue mal entre imaginaire, symbolique et réel") pour comprendre finement tout ce qui se joue. Le séminaire a la qualité d'être interactif : Lacan répond aux questions des participant·e·s et les invite surtout à commenter les textes (une partie non négligeable du livre est donc constituée de commentaires de commentaires).

 Il va sans dire que l'idéal est de relire les textes dont il est question avant de lire la partie qui leur est consacrée : je ne l'ai pas fait et ça a contribué au fait que j'étais souvent perdu, même si j'étais bien content d'avoir de vagues souvenirs, par exemple, des Cinq psychanalyses de Freud. Mais force est d'admettre que même en ayant lu chaque texte en temps réel comme ça paraissait logique de le faire, j'aurais été perdu la plupart du temps : entre les références à la philosophie du langage (il est question à un moment de la création par l'humain du mot "éléphant" qui si j'ai bien saisi aurait eu plus de conséquences pour les éléphants qui tout ce qui a pu se produire d'autre dans leur vie d'éléphant, l'idée viendrait de Hegel), la complexité d'une bonne partie des propos (j'avais renoncé à comprendre l'histoire du miroir convexe posé en face d'un pot de fleur renversé bien avant que Lacan n'aille considérablement complexifier le truc) ou le fait que, décidément, certaines affirmations sont trop exotiques pour moi ("Les enfants, on les prend beaucoup trop pour des dieux pour l'avouer, alors on dit qu'on les prend pour des animaux" -mais de quels parents il peut bien parler?-, ou encore "L'animal est soumis à la mort quand il fait l'amour, mais il n'en sait rien" -la phrase n'est pas de Lacan, mais il y répond sans être perturbé le moins du monde-), l'essentiel de l'ouvrage ne m'a pas été tout à fait limpide. Pour ne rien arranger, les vignettes cliniques auxquelles se raccrocher pour éclairer la théorie sont rares. Je suis donc toujours aussi incapable qu'avant d'ouvrir le livre d'arbitrer, de dire si la psychanalyse lacanienne est un tissu de sophismes jargonnant ou si elle procure des éclairages transcendants sur la clinique analytique.

 Je ne peux que conseiller de l'aborder, pour ceux qui voudraient tenter l'aventure, déjà avec de l'aspirine de la patience, en ayant une connaissance au moins basique de Freud (et d'autres psychanalystes si possible), et de préférence un bon niveau en philosophie, en particulier pour ce qui concerne le langage.

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