Adoré (voire vénéré)
ou détesté, connu pour ses concepts aux noms... euh... originaux comme
mal-à-dit, sinthome ou objet a ou encore pour sa pratique de la
séance courte de la scansion, autant dire que c'est avec
appréhension que j'ai ouvert ce premier livre de Lacan, mais aussi avec la curiosité de savoir ce qu'il pouvait bien raconter exactement.
Dans cette série de séminaires, à travers à la
fois ses propres apports théoriques et des analyses minutieuses et
critiques de textes de Freud (y compris des éventuelles erreurs de
traduction), mais aussi par exemple de Mélanie Klein ou d'Alice et
Michael Balint (il est aussi question d'un texte de Saint Augustin,
mais j'ai cru comprendre qu'il ne s'agissait pas à proprement parler
d'un texte de psychanalyse), il sera avant tout question de
représentation. Entre la communication entre analysé·e et analyste,
le transfert ("de n'être pas reconnu, le transfert a opéré comme
obstacle au traitement. Reconnu, il devient le meilleur appui du
traitement"), le rêve ("chaque élément signifiant du rêve,
chaque image, fait référence à toute une série de choses à
signifier, et inversement, chaque chose à signifier est représentée
dans plusieurs signifiants"), les manifestations de l'inconscient,
nombreux sont en effet les concepts à préciser ("on distingue mal
entre imaginaire, symbolique et réel") pour comprendre finement
tout ce qui se joue. Le séminaire a la qualité d'être interactif :
Lacan répond aux questions des participant·e·s et les invite surtout à
commenter les textes (une partie non négligeable du livre
est donc constituée de commentaires de commentaires).
Il va sans dire que l'idéal est de relire les
textes dont il est question avant de lire la partie qui leur est
consacrée : je ne l'ai pas fait et ça a contribué au fait que
j'étais souvent perdu, même si j'étais bien content d'avoir de
vagues souvenirs, par exemple, des Cinq psychanalyses de
Freud. Mais force est d'admettre que même en ayant lu chaque texte
en temps réel comme ça paraissait logique de le faire, j'aurais été
perdu la plupart du temps : entre les références à la
philosophie du langage (il est question à un moment de la création
par l'humain du mot "éléphant" qui si j'ai bien saisi aurait eu
plus de conséquences pour les éléphants qui tout ce qui a pu se
produire d'autre dans leur vie d'éléphant, l'idée viendrait de
Hegel), la complexité d'une bonne partie des propos (j'avais renoncé
à comprendre l'histoire du miroir convexe posé en face d'un pot de
fleur renversé bien avant que Lacan n'aille considérablement
complexifier le truc) ou le fait que, décidément, certaines
affirmations sont trop exotiques pour moi ("Les enfants, on les
prend beaucoup trop pour des dieux pour l'avouer, alors on dit qu'on
les prend pour des animaux" -mais de quels parents il peut
bien parler?-, ou encore "L'animal est soumis à la mort quand il
fait l'amour, mais il n'en sait rien" -la phrase n'est pas de Lacan,
mais il y répond sans être perturbé le moins du monde-),
l'essentiel de l'ouvrage ne m'a pas été tout à fait limpide. Pour
ne rien arranger, les vignettes cliniques auxquelles se raccrocher
pour éclairer la théorie sont rares. Je suis donc toujours aussi
incapable qu'avant d'ouvrir le livre d'arbitrer, de dire si la
psychanalyse lacanienne est un tissu de sophismes jargonnant ou si
elle procure des éclairages transcendants sur la clinique
analytique.
Je ne peux que conseiller de l'aborder, pour ceux
qui voudraient tenter l'aventure, déjà avec de l'aspirine de la
patience, en ayant une connaissance au moins basique de Freud (et
d'autres psychanalystes si possible), et de préférence un bon
niveau en philosophie, en particulier pour ce qui concerne le
langage.
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