D'apparence évident et plutôt omniprésent (le sujet peut se glisser dans la vie amoureuse, scolaire, professionnelle, ou même quand on se regarde dans le miroir ou qu'on choisit une voiture ou des vêtements), le terme n'est pourtant pas si évident à définir, que ce soit pour l'ensemble de la population ("demandez-leur de vous donner une définition aussi précise que possible, ils en seront pour la plupart incapables") ou pour... des professionnel·le·s ("l'estime de soi est encore, pour les chercheurs, un vaste chantier d'où n'émerge aucune théorie globale. Les approches sont multiples et foisonnantes, et s'y repérer n'est pas facile").
Pour ne rien arranger, l'estime de soi se définit par son degré (on peut avoir une estime de soi haute ou basse) mais aussi par... sa stabilité, élevée ou au contraire très vacillante, autant dire que ses manifestations sont diverses! Et, niveau de complexité supplémentaire, une même manifestation (comme se réhausser par procuration, par exemple par le name-dropping ou à l'inverse en rabaissant d'autres personnes, ou encore ne pas mettre tous les moyens pour réussir et le faire savoir) peuvent avoir des racines différentes voire opposées (si je révise peu pour mon concours, ça peut être pour pouvoir dire que l'échec à venir n'était finalement pas un vrai échec, mais quelqu'un d'autre pourra au contraire se réjouir à l'avance de pouvoir dire qu'iel a réussi sans même avoir besoin de travailler). Les enjeux sont nombreux, et peuvent concerner le rapport à l'échec (donc la capacité à avoir des objectifs ambitieux et surtout à persévérer, sachant en plus que le vécu ne sera pas le même selon qu'objectifs et éventuelles difficultés seront ou non publics), la sécurité de l'image de soi (complexes physiques, besoin d'afficher sa supériorité -avec des signes ostensibles de goût ou de richesse-, en racontant -peut-être avec un peu de liberté créative- ses exploits, ...-), ou encore la capacité à accepter des critiques ou... des compliments! Les auteurs détailleront aussi l'influence que pourront avoir les déchirures de l'ego dans des pathologies telles que l'alcoolisme, la dépression ou les traumatismes, ainsi que l'intérêt et les limites de travailler sur cet axe.
L'enfance et l'adolescence ont évidemment leur importance : les auteurs invitent les parents à être présents tout en laissant de l'espace et à pratiquer l'écoute avant les conseils (la solutionnite aigüe dépossède la personne ainsi "aidée" de son pouvoir d'agir, en plus de risquer de tomber à côté du vrai besoin), mais aussi associer approche positive inconditionnelle (être adoré·e quand on gagne une médaille de natation, puis détesté·e quand on a pas été assez conciliant·e lors d'une dispute, si c'est au quotidien ça complique les choses pour construire un socle sain) et... conditionnelle. Ce dernier point peut prendre au dépourvu (surtout pour moi qui me forme à un modèle de thérapie dont l'approche positive inconditionnelle est littéralement l'un des piliers!), mais en y regardant de plus prêt, répéter à son enfant qu'il est le meilleur quelles que soient les circonstances et que les signes du contraire ne font que révéler que l'Univers se trompe n'aide en effet probablement pas à accepter les critiques constructives et les situations d'échec (et pour ce qui est de dénigrer de façon inconditionnelle, inutile de faire un dessin). Les auteurs donnent aussi des clefs pour réparer ou booster l'estime de soi dans le couple ou en milieu professionnel, y compris en proposant des contre-modèles avec des listes de choses à ne pas faire (qui serviront respectivement à mettre de côté de mauvaises habitudes et communiquer plus sainement, et à identifier des situations de harcèlement moral en entreprise, et non l'inverse, enfin j'espère!).
Les deux derniers chapitres concerneront les solutions plus concrètes, respectivement les défenses, solutions tentantes et effectivement efficaces à court terme mais nourrissant potentiellement un cercle vicieux que chacun·e aura probablement mis en place au moins une (ou deux) (ou douze) fois, et les conseils de thérapeute pour une réparation plus solide. Ce dernier chapitre peut parfaitement se lire indépendamment du reste pour les personnes qui veulent passer aux choses sérieuses plus que tout savoir sur les subtilités du sujet. Les auteurs proposent et détaillent neuf clés (se connaître, s'accepter, être honnête avec soi-même, agir, faire taire le·a critique intérieur·e, accepter l'échec, s'affirmer, être empathique, s'appuyer sur le soutien social), elles-mêmes réparties en trois domaines (le rapport à soi-même, le rapport à l'action, le rapport aux autres), et conseillent de concentrer ses efforts sur l'une d'entre elles, dans la mesure où elles sont interdépendantes (plus je suis à l'aise pour agir et prendre des risques -en restant dans une zone de confort qui me convient!-, plus je vais oser et donc réussir, et moins je vais dépendre de l'approbation des autres). Ils donnent également des conseils pour choisir un·e thérapeute pour les personnes qui voudraient avoir une aide professionnelle, et invitent à se concentrer sur certaines attitudes (l'acceptation des questions et critiques, la transparence sur le fonctionnement de la thérapie, ...) plus que sur les diplômes, ce que j'approuve avec la plus incontestable des objectivités.
L'aspect vraiment concret arrive peut-être un peu tard pour un livre de vulgarisation, mais les conseils pratiques, qui sont solidement argumentés, peuvent se lire séparément, et la partie théorique reste impliquante et accessible.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire